Inflation réglementaire et coûts de la construction

Inflation réglementaire et coûts de la construction « Ce rapport a remis le débat à sa juste place »

Olivier Tommasini, président d’un groupe auteur dudit rapport, estime qu’un moratoire a été obtenu du gouvernement. Il attend la suite et doit faire une intervention durant le salon Nordbat.

En juillet dernier, un rapport a été remis au ministère du logement. Son intitulé : « Analyse de l’évolution comparée des prix et des coûts dans le bâtiment. Préconisations en matière de simplifications réglementaires ». Depuis, ce document sert de base à d’autres réunions de travail et de suivi.

« Il a été élaboré entre mai et juillet par un groupe d’une dizaine de chefs d’entreprise français et d’experts de la Fédération française du bâtiment », explique Olivier Tommasini (cf.encadré), président de ce groupe. L’étude concerne le domaine de la construction de logements pour le compte de bailleurs sociaux ou de promoteurs.

Répondre aux griefs. Au cœur de ce rapport, la volonté de la profession de répondre, avec des arguments chiffrés, à ceux qui affirment que les entreprises du BTP sont responsables, mais pas entièrement bien sûr, des prix trop élevés de l’immobilier. « On a invoqué, par exemple, nos charges trop élevées, l’absence de concurrence. On a dit aussi que nous étions mal organisés… »

Olivier Tommasini tient à préciser, au passage, que le secteur du bâtiment représente 80 000 personnes dans le Nord-Pas-de-Calais et que sa profession a souffert de la baisse des investissements dans ce domaine. « Nous avons enregistré 2 663 pertes d’emploi entre juin 2012 et juin 2013. Nous voulons garder nos effectifs car nous en aurons besoin. »

Le rapport distingue les coûts de la construction et les coûts de fonctionnement et reprend, entre autres chiffres, ceux de l’INSEE. Exemples : + 100% pour le coût du neuf entre 1997 et 2012 ; ou encore + 55% pour le coût de la construction.

Responsabilité partagée. Le groupe de travail a décortiqué les différentes hausses : coûts de l’énergie, des matières premières et matériaux, coût de la main-d’œuvre, coûts de chantier (droits à payer liés à l’occupation du domaine public, gardiennage indispensable, frais de bases de vie ou de locations d’engins)… « Ces droits de voirie, ces taxes font que des terrains dans les grandes villes restent en attente », commente-t-il.

L’analyse fait donc un inventaire détaillé des coûts et entend démontrer qu’il y a un bon nombre qui ne relèvent pas, de fait, de la responsabilité des entreprises.

L’Etat a sa part. Le rapport pointe surtout du doigt les surcoûts imputables à ce qu’Olivier Tommasini appelle « l’inflation réglementaire ». Une frénésie qui multiplie les normes thermiques, d’accessibilité, celles qui ont pour motivation le principe de précaution, qu’elles aient été ou non provoquées par un accident ou un drame.

A noter que le chef d’entreprise ne s’en prend pas seulement à l’Europe, que l’on sait très « normative », mais aussi à l’Etat français qui en « rajoute une couche ».

Son constat : « Jusqu’en 2008, la croissance économique permettait d’avaler les effets de ce phénomène, mais maintenant, avec la crise, il freine la construction. Elles partent toutes d’un bon sentiment, d’accord, mais quand elles sont à ce point généralisées et additionnées, on en arrive à des surcoûts de l’ordre de 15%. En a-t-on les moyens aujourd’hui ? »

Olivier Tommasini relève au passage des aberrations que les entreprises reconnaîtront au passage : la réglementation sur les termites là où il n’y en a pas (Pas-de-Calais), celle sur les cloisons de second œuvre liée à un risque sismique très faible (le Hainaut), celle qui oblige à prévoir des cages d’ascenseur sans… ascenseurs.

Et maintenant ? Olivier Tommasini estime aujourd’hui que le débat entre les différents partenaires ? constructeurs, ministère du Logement, bailleurs et promoteurs – a été remis à sa juste place. « Nous avons un intérêt commun : que la construction reparte. » Il dit avoir obtenu de l’Etat un moratoire de deux ans sur les normes et que ce dernier serait même prêt à revenir sur certaines d’entre elles.

Qui est Olivier Tommasini ?

Olivier Tommasini, 46 ans, est directeur général de l’entreprise qui porte son nom. L’histoire de celle-ci a commencé en 1922 avec la création, par son grand-père, d’une activité de maçonnerie. Basé à Aulnoye-Aymeries, ce qui est devenu un groupe compte aujourd’hui cinq sites et 300 salariés. C’est en sa qualité de président régional de la FFB qu’il a été choisi pour présider le groupe auteur du rapport.

Bernard KRIEGER